Haute-Savoie : un amas d’eau inquiétant menace la vallée de Saint-Gervais

Le maire de Saint-Gervais craint la rupture d’une poche d’eau située sous un glacier. Si, en 1892, la catastrophe avait coûté la vie à 175 personnes, le bilan pourrait être encore plus important aujourd’hui.

 Une pelle-araignée de plus de 10 tonnes avait été montée sur le glacier de Tête Rousse en août 2010, afn de vidanger progressivement une poche d’eau de 65 000 m³.
Une pelle-araignée de plus de 10 tonnes avait été montée sur le glacier de Tête Rousse en août 2010, afn de vidanger progressivement une poche d’eau de 65 000 m³. LP/Serge Pueyo

    C'est une épée de Damoclès suspendue sur Saint-Gervais et ses habitants. Un amas d'eau grossit actuellement sous le glacier de Tête Rousse, qui domine la vallée de Haute-Savoie. Une situation inquiétante pour le maire de cette ville, lourdement endeuillée il y a 130 ans en raison du même phénomène.

    Jean-Marc Peillex s'est alarmé cette semaine auprès des médias, et notamment de l'AFP, du dernier rapport annuel rendu en février par des experts du Service géologique national, concluant à la présence sous le glacier, situé à plus de 3000 m d'altitude, de deux poches pouvant contenir jusqu'à 40 000 m³ d'eau au total.

    La poche située en amont contiendrait à elle seule jusqu'à 30 000 m³ d'eau, soit 40 % de plus que le volume estimé lors des dernières mesures remontant à 2015.

    Entre 2000 et 3000 personnes menacées

    La rupture d'une telle poche d'eau, qui avait dévalé en 1892 sur Saint-Gervais en emportant sur son passage glace, arbres et rochers, avait causé la mort de 175 personnes. En 2009, la formation de nouvelles poches d'eau intraglaciaires avait été mise en évidence, aboutissant à des opérations de pompage plusieurs années successives, et à la mise en place d'un système de contrôle par câbles de possibles mouvements du glacier, de sirènes d'alarme et d'un plan d'évacuation d'urgence.

    En 2016, Jean-Marc Peillex, craignant que la population soit moins vigilante et « ne croie plus à la possibilité d'une catastrophe », qui ferait selon lui « entre 2000 et 3000 morts », préconisait plutôt la création de « plages de dépôt » supposées « casser » le flux si une nouvelle poche d'eau sous pression se rompait.

    Financer les travaux

    Alors que, depuis 2010, les opérations de pompage et de surveillance ont déjà coûté 1,2 million d'euros à Saint-Gervais (l'Etat finançant les 80 % restants), ces travaux coûteraient environ 4 millions d'euros. Le SM3A (Syndicat mixte d'aménagement de l'Arve et de ses affluents), s'est engagé à en payer la moitié, à parts égales avec l'Etat, mais rien n'a été entrepris pour l'instant, en raison de « petits jeux politiques » locaux, selon le maire de Saint-Gervais.

    Jean-Marc Peillex craint aujourd'hui que la poche amont ne continue à grossir pour se déverser dans la poche aval, créant « un effet de chasse d'eau » dévastateur : « Je veux protéger ma population, et que la promesse de travaux faite en 2016 se réalise », insiste-t-il.